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Trail

La Sahraouiya, un raid solidaire féminin incroyable !

Sahraouiya

Je voulais revenir sur mon expérience vécue à la Sahraouiya : cette épreuve a été tellement riche en émotions et restera à toujours gravée dans mon coeur. Ca a été pour moi, une très belle aventure humaine, des rencontres fantastiques, quelque chose de très fort.. je voulais absolument écrire tout cela, en garder une trace..

La plus belle des motivations

J’ai connu la Sahraouiya que très tardivement, par un ami. Je suis venue seule sur l’événement et du coup j’ai découvert ma coéquipière là-bas, El Batoul Arjdal.

Batoul est une jeune marocaine incroyable : elle a des performances physiques impressionnantes, semi en 1h17, 10km en 34min..
Elle rêve de devenir athlète professionnelle mais a beaucoup de mal à se faire sponsoriser. Elle emprunte l’argent de ses amis pour pouvoir s’inscrire sur des courses, n’a aucun matériel digne de ce nom, des baskets dans un état pitoyable, des cicatrices sur son dos car elle n’a pas de crème anti frottement.
Son histoire m’a vraiment émue et dès notre rencontre je me suis dis que je donnerai tout pour l’aider à gagner ce raid, et ainsi à se faire connaître.
Je n’ai jamais eu plus bel objectif de course !


Batoul venait d’un milieu très défavorisé : elle n’a jamais été à l’école et ainsi n’a pas appris à parler le Français. Elle parle seulement Arabe. Me voilà donc en équipe sur une compétition assez stratégique, avec une personne avec qui je ne peux pas communiquer. Quel challenge ! En plus, elle est assez nerveuse : elle veut gagner, coûte que coûte !

La course !

Jour 1

La course a démarré sur le chapeau des routes ! La première étape était un cross de 4km dans la ville, suivi d’une course d’orientation ! Ma coéquipière Batoul part pleine balle avec le groupe d’athlètes professionnelles marocaines. J’arrive en retard sur le premier point de contrôle où on nous remet les cartes, et je la vois déjà assez énervée ! Elle veut rattraper les autres et nous repartons sans qu’elle me laisse le temps de me poser et réfléchir à la course d’orientation. Je suis en survitesse et peu lucide, mais je vois quand même que nous partons hors carte. Je lui dis qu’il faut faire demi tour, qu’elle se trompe. C’est à ce moment la que je découvre ce que j’appellerai plus tard le « GPS marocain » : quand un marocain ne connaît pas le chemin, il demande aux passants par où il faut aller, plutôt que de réfléchir à la carte.

Ainsi, Batoul demande le chemin à un passant, et celui-ci lui indique évidemment la mauvaise direction empruntée par le groupe de tête. Et elle repart de plus belle et très énervée ! J’essaye de lui expliquer, de lui mimer, mais rien à faire, elle est dans sa bulle…

Finalement, je commence à en avoir assez de courir trop vite pour moi, et par dessus tout dans la mauvaise direction. Je décide de faire demi tour : tant pis pour elle, elle sera bien obligée de me suivre… Et la, c’est l’explosion ! Elle s’énerve de plus en plus, ne comprend pas ce que je fais, me traite de tous les noms, enfin je suppose 😉 ! Je reste concentrée et j’enchaine les balises.. une.. deux.. trois !

La course est très ludique : il faut trouver différents objets un peu partout dans la ville. Batoul commence à comprendre que je maitrise la situation, elle se calme et nous avançons bien ! Finalement, nous passons la ligne d’arrivée en première position. Je la vois avec son grand sourire, beaucoup d’émotions…

Jour 2

Suite à cette première étape un peu tendue, Batoul a compris que j’avais l’expérience, et elle, les jambes ! Après une nuit en bivouac sous un ciel étoilé incroyable, la 2ème journée commence par un « boot  camp », une sorte de parcours du combattant ! La clairement, je suis dans mon élément ! Nous enchainons les ateliers et nous plaçons en 3ème position, juste derrière les deux équipes d’athlètes professionnelles marocaines !

La journée n’est pas finie pour autant, nous avons encore une épreuve nocturne qui nous attend le soir : Run and Bike et Trail, pour un total de 19km. J’appréhende beaucoup cette étape qui est purement physique : difficile pour moi de rivaliser avec les équipes d’athlètes pro !

Je pars naturellement avec le vélo. Batoul n’en veut pas, elle n’en a jamais fait. Je roule sur la piste et je la vois courir à bon rythme à coté de moi. Un petit coup d’œil à mon gps : 13,5km/h. Ok, elle est vraiment en forme cette petite ! Elle tiendra ce rythme sur les 19km ! Incroyable ! Finalement, nous minimisons la casse sur cette étape purement physique, et nous gardons notre première place au classement général.

Jour 3

Le 3ème jour est un peu plus à mon avantage : il y a de nouveau une course d’orientation, c’est le moment de creuser un écart confortable ! La journée commence par 9km de run and bike.

Et la, surprise, les 2 équipes d’athlètes marocaines restent avec nous. Nous évoluons ensemble, à un rythme tranquille, l’ambiance est décontractée… elles ont bien décidé d’arriver en même temps que nous sur le départ de la CO pour nous suivre ! Elles ont bien compris que c’était mon élément.

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Il faut la jouer stratégique, pas le choix. Nous arrivons sur le départ de la CO : chaque équipe a 1h30 pour trouver les balises en ordre libre à partir du moment où on leur remet la carte. Je choisis de refuser la carte : je m’assois et je laisse partir les autres équipes. Je vois les filles qui m’attendent et qui guettent le moindre de mes mouvements : je meurs d’envie de partir, mais je résiste et j’attend qu’elles se dispersent. 30min plus tard, je ne les aperçois plus. C’est le moment d’être rapide et efficace : nous prenons la carte et nous commençons par la balise la plus éloignée des autres équipes ! Nous enchainons rapidement les balises et arrivons au point de contrôle en première position.

Une portion de run and bike plus tard, nous passons la lignée d’arrivée en première position, avec une avance confortable ! Ouf, objectif atteint !

Jour 4

Le 4ème jour est de nouveau une journée physique : 7km de run and bike et 9km de trail en orientation (azimut). Nous arrivons de nouveau 3ème, loin derrière les premières tout de même. Nous voilà toujours première au classement général mais la course est serrée. En plus l’étape du lendemain est très incertaine : il y a une épreuve de 5km de Kayak et Batoul n’a jamais fait de kayak ! Pire, elle ne sait même pas nager ! Je ne sais pas du tout comment elle va réagir en pleine mer, et ca va être difficile pour moi de lui donner des instructions. En plus, le vent incessant de Dakhla va vraiment compliquer l’épreuve de kayak.

Jour 5

 

 

Le 5ème jour, au petit déjeuner, je trouve un manche à balai sur le camp et je m’en sers de simulateur à kayak. Je retrouve Batoul et je lui apprends les mouvements de pagaye : chercher loin devant, bras tendu, être régulière, tourner les poignets…ok, ca peut le faire !

Le départ est donné, nous courrons à nos kayaks. Batoul galère à monter dedans. Elle qui est si à l’aise sur le sol met 3h pour monter dans un kayak, incroyable ! Finalement nous partons enfin. Batoul se révèle assez efficace à l’avant, même si elle donne pas mal de coups de pagayes parasites. Je compense comme une malade à l’arrière pour que le kayak file droit.


Finalement, nous atteignons l’objectif, « l’ile du dragon », en première position ! Mais je suis épuisée, peu lucide, et pourtant une nouvelle course d’orientation m’attend ! On me donne une photo aérienne de l’ile, mais je n’arrive à rien. Je nous fais tourner en rond, je suis trop fatiguée, je n’arrive pas à compter les rentrants, je me perds… Les autres équipes nous rattrapent, l’angoisse !

Nous retournons au départ pour se recaler sur la carte : 20min de perdues. Isa, il faut que tu te bouges maintenant ! Mon cerveau se réveille enfin et nous enchainons les balises.

Retour en kayak. Le vent s’est levé et ca devient compliqué : je demande à Batoul si elle veut marcher ou pagayer.. Pas étonnant, elle préfère marcher :p
Je rejoins la plage la plus proche et nous tirons le kayak ! Nous arrivons premières, ouf, soulagement !

Jour 6

Le 6ème jour nous avons le droit à une épreuve originale : un trail de 4km jusqu’à une énorme dune, puis un retour dans la mer, avec de l’eau jusqu’à la taille. Nous avons une avance confortable mais Batoul a décidé de me faire souffrir 🙂 Elle impose un rythme soutenu, et sans surprise nous nous plaçons 3ème de l’étape.

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Mon bilan, et quel bilan !

Je n’aurai jamais cru pouvoir gagner ce raid. Le niveau physique des équipes de tête était élevé. Finalement, c’est notre bonne communication dans l’équipe qui nous a sauvé. Etonnant finalement de la part de 2 personnes qui ne peuvent pas parler entre elles !

J’ai vécu une histoire incroyable avec Batoul. Une véritable amitié s’est crée entre nous. Des rires, beaucoup de joie, et des larmes le jour du départ.

Je conseil vivement la Sahraouiya : j’y ai rencontré des tas de femmes incroyables, qui prennent leur destin en main et font bouger le monde ! La Sahraouiya est un raid solidaire : chaque équipe représente une association. Moi même je représentai l’association l’Enfance Pétillante, une association qui aide les gens malades ou handicapés à réaliser des exploits sportifs. Cette épreuve m’a mis en relation avec des femmes engagées, solides, incroyables, passionnantes. Des femmes qui sont maintenant devenues mes amies.

Cet événement a aussi été largement médiatisé, ce qui a apporté beaucoup à mon association!

N’attendez plus, foncez !
Qui y retourne avec moi l’an prochain?

 

Tags : maroctrail
Isa

À propos de l'auteur Isa

Ingénieur informatique, j’ai décidé il y a six ans de changer de vie. J’ai plaqué mon métier et j’ai alors commencé à parcourir le monde, devenant peu à peu photographe, vidéaste, puis blogueuse !

Viens papoter !